Journée européenne contre la traite des êtres humains:un nombre de victimes toujours accablant sur le territoire français, très majoritairement victimes d’exploitation sexuelle

En présence notamment de Roxana MARACINEANU, Secrétaire générale de la MIPROF et de Christine GONZALES-DEMICHEL, Inspectrice générale de l’INSEE, cheffe du service statistique ministérielle de la sécurité intérieure (SSMSI), étaient présentées la 7ème édition de l’enquête annuelle sur les victimes de traite des êtres humains (TEH) accompagnées en France (4500 victimes repérées par les associations) et l’étude sur les données administratives relatives à la TEH en 2022.

 

Nous regrettons la faiblesse des poursuites et des condamnations des auteurs et la faiblesse du repérage et de la protection des victimes.

 

La TEH (traite des êtres humains) définie à l’article 225-4-1 du code pénal, se caractérise par :

  • Un acte : recrutement, transport, transfert, accueil, etc.
  • Un moyen : par la contrainte, la violence, la tromperie, etc.
  • Un but : exploitation sexuelle, travail forcé, contrainte à commettre des délits, mendicité forcée, etc.

 

7ème édition de l’enquête annuelle sur les victimes de traite des êtres humains accompagnées en France :

 

Cette enquête sous-évalue le nombre effectif de victimes : il ne s’agit que des victimes accompagnées par les associations.

 

La traite des êtres humains prend plusieurs formes. Les victimes accompagnées par les associations sont proportionnellement : 76% victimes d’exploitation sexuelle, 15% d’exploitation par le travail, 7% contraintes à commettre des délits, 2% mendicité forcée. Plus de 4 victimes sur 10 sont exploitées à la fois en France et à l’étranger.

 

Parmi les victimes :

  • 82% de femmes (contre 77% en 2021), 7% des hommes et 2% des personnes transgenres (ces dernières uniquement victimes d’exploitation sexuelle) ;
  • 16% de mineures (quais doublement par rapport à 2021), 36% des victimes mineures étaient potentiellement des mineur.es non accompagné.es (MNA) ;
  • 70% sont originaires d’Afrique (dont 56% de Nigérianes), 11% de victimes françaises (hausse de 6 points par rapport à 2021), 10% d’Amérique latine et des Caraïbes ;
  • Pour 83% des victimes le transfert est organisé par l’exploiteur ou le réseau, pour 94% des victimes, l’hébergement est organisé par l’exploiteur ou le réseau ;
  • 39% des victimes ont déposé plainte pour TEH. Parmi les victimes ayant besoin d’un titre de séjour, seules 42% seulement en bénéficient.

 

En matière d’exploitation sexuelle :

  • 94% sont des filles et des femmes,
  • 13% sont mineures (cette part a doublé depuis 2021 ; dont 98% de filles),
  • 52% sont Nigérianes, 15% Françaises, 7% Brésiliennes (extension des réseaux d’Amérique latine)

La traite à visée d’exploitation sexuelle est un système d’emprise et de violences comme le révèlent les données, notamment :

  • 23% des femmes victimes ont connu une grossesse au cours de leur exploitation, 5% un mariage forcé ;
  • 68% de victimes ont déclaré avoir subi des violences physiques, 50% des violences sexuelles et 68% des violences psychologiques et/ou verbales de la part de leurs exploiteurs ;
  • 87% des victimes ont déclaré avoir subi des violences physiques dans le cadre de leur exploitation par des personnes en dehors du réseau (acheteurs d’acte sexuelle notamment),
  • 36% des victimes sont potentiellement en situation d’addiction ;
  • 93% des victimes ont été transférées vers la France par l’exportateur ou le réseau d’exploitation ;
  • 94% ont étaient hébergées par l’exploiteur ou le réseau d’exploitation ; 36% vivent directement sur le lieu d’exploitation.

 

Étude sur les données administratives (justice et forces de l’ordre) relatives à la TEH en 2022 :

 

Ces données apparaissent très en-deçà des attentes, face au nombre de victimes identifiées par les associations :

  • 2 027 victimes de traite ou d’exploitation des êtres humains ont été enregistrées par les services de police et de gendarmerie (+12% par rapport à 2021) ;
  • 1 953 mis en cause – baisse de 8% par rapport à 2021) ;
  • 1 793 personnes ont été poursuivies, dont 57% à travers une procédure d’instruction. A la suite de l’instruction, 66 personnes ont bénéficié d’un non-lieu, 762 ont été renvoyées vers une juridiction de jugement dont 49 vers une cour d’assise ;
  • 1 046 personnes ont été condamnées pour traite ou exploitation des êtres humains : 77% des condamnés sont des hommes, 40% des étrangers. 673 personnes ont été condamnées à une peine d’emprisonnement ferme ou en partie ferme pour ce motif. La durée moyenne de la peine d’emprisonnement ferme est seulement de 26.3 mois.
  • Entre 2021 et 2022, les délivrances de carte de séjour temporaire en qualité de victime de traites humains et de carte de résident, enregistrées par les préfectures, ont respectivement augmenté de 5% et 7%. Les délivrances d’autorisation provisoire de séjour (APS) dans le cadre de parcours de sortie de prostitution (PSP) ont augmenté de 59% sur la même période.

 

Ces données révèlent la poursuite de la hausse des victimes de TEH en France et de la sur-représentation en son sein des victimes d’exploitation sexuelle. Exploitation sexuelle qui, il faut toujours le rappeler, est alimentée par les acheteurs d’actes sexuels, insuffisamment pénalisés en France malgré une solide et cohérente loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et l’accompagnement des personnes prostituées.

 

Nous regrettons la faiblesse des poursuites et condamnations des auteurs et la faiblesse du repérage et de la protection des victimes.