Le système prostitutionnel

La prostitution est un système parce que :


Derrière chaque personne en situation de prostitution, il y a bien souvent un proxénète, toujours un “client” ou prostitueur, et souvent un réseau de proxénètes et de “clients”, et une société qui méprise ou banalise.

C’est un marché considérable, engendré par la demande d’achat de “services” sexuels, bénéficiant à des organisations criminelles qui organisent l’exploitation sexuelle d’autres êtres humains, principalement des femmes, principalement pauvres, principalement étrangères.

Inclus dans l’industrie du sexe mondialisée, ce marché se nourrit des rapports de domination qui structurent nos sociétés.

Ainsi la prostitution est un système de violence structuré principalement par l’action conjointe des proxénètes et des clients qui provoquent et réclament la mise en assujettissement de personnes, le plus souvent des femmes et des enfants mais aussi des hommes et, de fait leur déplacement et/ou leur offre comme des marchandises dans le monde entier. La prostitution est une organisation produite par la double domination masculine et de l’argent au profit des prostitueurs, accès au corps d’une personne pour le “client”, profits monétaires pour le proxénète ou trafiquant; elle est une violence de genre qui impose des actes sexuels sans désir à des personnes que des violences subies dans l’enfance et l’adolescence et/ou la pauvreté ont rendu vulnérables. Elle implique aussi Etats, groupes et institutions, soit par une participation directe ou indirecte à ce viol marchandisé, (organisation comme un commerce et perception de revenus), soit par un rôle plus global de renforcement ou non des représentations (masculin/féminin), d’exigence ou non de l’égalité en général et entre les femmes et les hommes, par des actions de lutte ou pas contre la prostitution, par l’insuffisance de la prise en compte et de la réduction de la pauvreté et de la précarité ainsi que des violences commises dans la famille.

Geneviève Duché, Non au système prostitutionnel, Editions Persée, p 293

[FR] Vous avez des droits !

La loi du 13 avril 2016


 

La loi du 13 avril 2016 confirme la position abolitionniste de la France qui considère la prostitution comme une atteinte à la dignité des personnes, comme contraire à l’égalité entre les femmes et les hommes, et les personnes prostituées comme victimes du système prostitutionnel – un système fondé sur le patriarcat, sur l’assujettissement de beaucoup de femmes, d’hommes et d’enfants en situation précaire et leur assignation directe au plaisir masculin. Les prostitueurs – acheteurs, proxénètes et trafiquants – sont des auteurs de violence encouragés par tous-tes ceux et celles qui souhaitent que la prostitution soit un métier.

Pourquoi reconnaitre une personne comme victime ?


 

Reconnaître une personne comme victime, c’est reconnaître qu’elle est sujet de droit et qu’elle a droit à son intégrité, à ne pas subir de violences, à ce que soit reconnu le préjudice subi.

 

En tant que victime de la prostitution, du proxénétisme et de la traite des êtres humains, vous avez des droits !

[EN] You have rights !

The French April 13 2016 law


 

The French April 13 2016 law confirms France’s abolitionist position, considering prostitution as an infringement of human dignity, in opposition with equality between men and women, and prostituted persons as victims of the prostitutional system – a system that is based on patriarchy, the subordination of many women, men and children in precarious situation, and their direct assignation to men pleasure. Buyers, pimps, and traffickers are perpetrators of violence, supported by all those wishing for prostitution to be a job.

Why recognising someone as a victim?


 

Recognising a person as a victim means that she/he has rights: right to her/his integrity, not to suffer violence, to see the endured damages acknowledged.

 

As a victim of prostitution, pimping, and human trafficking, you have rights !

Témoignages de survivant·e·s de la prostitution

Rachel

« Quand les gens me posent des questions sur la violence je crois qu’ils sont à côté du vrai enjeu. Ce que ne comprennent pas ces personnes c’est le fait que l’acte lui-même est violent. Que même l’homme le plus gentil qui ait touché mon corps était violent. Et, en fait, d’une certaine façon c’était pire parce qu’il était plus malhonnête que celui qui me frappait à la tête et qui au moins me disait ce qu’il pensait de moi ».

Rachel Moran, Paid For : My Journey Through Prostitution

Paperback, 2015

Angel

« En tant que survivante de la pornographie, de la prostitution et de la violence conjugale, il n’y a rien de plus pénible que de voir les autres se battre pour défendre les droits des autres femmes à être traitées comme je l’étais. Les arguments invoqués par les défenseurs de l’industrie du sexe sont abstraits, impersonnels, distanciés, édulcorés au-delà de toute expression. Je défie quiconque, homme ou femme, qui a été témoin de ce que j’ai moi-même vécu, qui a fait les mêmes expériences que moi -violée, battue, menacée, vendue – de continuer à défendre les pratiques de l’industrie du sexe »

Angel K, On Equality, mai 2010

Traduit par le lobby européen des femmes (LEF)

Mylène

« Le plus lourd, c’est d’avoir été achetée. Tu n’es rien du tout, je paye. Je me sers de toi comme d’une bassine. Pour me vider. En plus j’ai été volontaire. Je n’ai jamais eu de revolver sur la tempe. Quand c’est comme ça on n’a même pas l’excuse d’avoir été victime ! On a choisi. Mais choisi ou pas le traumatisme est le même ».

Mylène, Revue Prostitution et Société

Laurence

« Moi qui ai vécu la prostitution, je l’ai ressentie comme un viol, ou plutôt des viols incessants ; comme la destruction et l’anéantissement d’une partie vivante de moi-même. Mon vécu n’a fait que renforcer ma honte d’exister »

Laurence Noëlle, Renaître de ses hontes

Le Passeur éditeur, 2013

Rosen

« J’ai eu plus de 30 000 clients dans ma carrière de prostituée, à raison d’une moyenne de quatre par jour. Plus de 30 000 rapports sexuels dont je ne voulais pas, que je refusais de tout mon corps. 30 000 fois la sensation d’être niée, réduite à néant, d’être une femme robot. 30 000 fois, j’ai subi le défilé de ces hommes indifférents, sûrs de leur bon droit ; dans un coin de bar à hôtesses, dans des salons insalubres, dans l’odeur du champagne renversé sur les banquettes et du sexe entêtant. […] Je ne suis pas née prostituée, ce sont ces hommes qui ont fait de moi une prostituée. Ce sont eux qui m’ont imposé plus de 30 000 rapports sexuels et donc autant de viols. »

Rosen Hicher, Tribune : « Pour en finir avec les clients« 

Libération, juillet 2014

Lire le récit de vie complet de Rosen Hicher, « Fleur de sel«  

Fiona

« En onze mois j’ai fait sept établissements. Le premier client, je ne m’en souviens pas. Je me souviens de mon arrivée et du premier coup de sonnette. Après il y a un blanc. Je ne me souviens de rien. Pas du client, pas de son visage. Rien. On vit, on se souvient. Et puis il y a la mort, il n’y a plus rien c’est pareil. Au premier coup de sonnette je suis morte »

Inès

« À mes débuts, je me suis souvent menti à moi-même, je me suis raconté des histoires, je me suis fait croire que faire la pute ça n’était pas si terrible, si horrible que ça. Avoir recours à ce processus psychologique était pour moi une chose vitale voire même une question de survie… le plus grand danger pour une pute c’est la lucidité. Réfléchir pour une pute peut être une calamité. C’est donc pour cela que je ne me pose plus de question… Je prends ma tête, j’enfonce ma tête dans un trou de sable comme pour les autruches et je me répète inlassablement, quotidiennement, tout va bien, tout va bien ».

Inès

France 2, après la diffusion d’un documentaire Infrarouge sur les “travailleuses du sexe”