[CP] Premier plan de lutte contre la prostitution des mineur.es:des besoins pour protéger les victimes des violences du système prostitutionnel

Paris, le 15 novembre 2021

 

Il n’y a pas de prostitution des mineur.es mais un système prostitutionnel qui exploite les vulnérabilités de personnes mineures, massivement des jeunes filles, en moyenne âgées de 15 à 17 ans, 12 ans pour certaines. Ce système n’existe que parce que des hommes, des prédateurs pédocriminels, estiment que leurs dites « pulsions sexuelles » doivent être assouvies par tout moyen, notamment par l’achat d’acte sexuel auprès de personnes adultes ou mineures, femmes, mais aussi hommes et personnes trans. Certains ont l’audace de nier connaitre l’âge de leurs victimes, quand d’autres recherchent sciemment de très jeunes proies.

 

Faut-il le rappeler : le système prostitutionnel est un système de violences qui repose en particulier sur les inégalités femmes-hommes et l’exploitation économique. Il y a continuum entre prostitution des mineur.es et des majeur.es, un très grand nombre de victimes majeures l’étaient déjà mineur.es. Parce qu’il y a ce continuum dans les violences, il n’y a aucune place à un « travail du sexe ».

 

Si les victimes mineures sont de tous milieux sociaux, il faut souligner que l’écrasante majorité est fragilisée par des facteurs de vulnérabilité : familles dysfonctionnelles, violences intrafamiliales, notamment violences du père envers la mère, maltraitance et éducation sexiste, violences sexistes et sexuelles à l’égard des enfants, difficultés avec le système scolaire voire décrochage, trouble de l’estime de soi, carences de compétences psycho-sociales… ces facteurs fragilisants sont amplifiés par les violences véhiculées par la pornographie, l’hypersexualisation des filles dès le plus jeune âge pour répondre à des stéréotypes de genre, une homophobie rendant difficile l’affirmation de soi pour certains jeunes, l’idée infondée que certains hommes auraient des pulsions sexuelles auxquelles il serait impératif de répondre, une société de survalorisation de pseudo signes extérieurs de richesse (smartphone dernier cri, vêtements et objets de luxe…)… mais aussi de réelles situations de précarité économique, errance suite à des ruptures familiales et fugues. De nombreuses victimes sont déjà connues de l’Aide Sociale à l’Enfance. A cela s’ajoutent les amplificateurs que sont Internet et les réseaux sociaux, qui facilitent les mises en contacts, avec la complicité de systèmes de location d’appartements et hôtels.

 

La loi est pourtant claire concernant l’achat d’actes sexuels par un adulte auprès de mineur.es, elle doit être connue et appliquée, car sans acheteurs-prostitueurs, pas de système prostitutionnel :

  • Mineur·es de moins de15 ans : qualification de viol puni de 20 ans de réclusion criminelle et 3M€ d’amende
  • Mineur·es de plus de 15 ans : 5 ans d’emprisonnement et une amende de 75 000€

 

Les victimes mineures sont en danger et relèvent de la protection de l’Enfance, comme l’impose la loi depuis 2002 : ce n’est pas une « expérience sexuelle », une « liberté de disposer de son corps » : c’est une exploitation pure et simple de la vulnérabilité d’enfants et adolescent.es, dans un contexte plus large de système prostitutionnel, seconde activité criminelle la plus lucrative avec 100 Md€ de « chiffre d’affaires » à travers le monde, que les exploiteurs ont bien compris.

L’Amicale du Nid œuvre depuis 1946 à la prévention et l’accompagnement des victimes du système prostitutionnel, avec plus de 230 professionnel.les qualifié.es par des actions de prévention auprès des jeunes, de sensibilisation et de formation des professionnel.les (organisme de formation certifié QUALIOPI), d’aller-vers dans l’espace public et sur Internet, d’accueil, d’accompagnement des victimes, cinq missions mineur.es spécifiques, plus de 500 places d’hébergement et de logement accompagné, une action de plaidoyer pour la pleine application de la loi par une volonté politique affirmée, et des moyens financiers à la hauteur des enjeux.

 

L’Amicale du Nid salue le plan présenté ce jour par Adrien TAQUET, secrétaire d’Etat chargé de l’Enfance et des Familles, auprès du Ministre des Solidarités et de la Santé et l’ensemble du Gouvernement. Notre association continuera d’agir sur le terrain pour décliner ce plan :

  • Priorité 1 « Ouvrons les yeux » – Sensibiliser, informer et mieux connaître : plateforme d’écoute, mailler le territoire national d’associations spécialisées pour accompagner les familles confrontées à des phénomènes prostitutionnels ou pré-prostitutionnels, recenser à l’école l’ensemble des actions éducatives de prévention en matière de lutte contre la prostitution, interventions de sensibilisation et de prévention dans les établissements de l’Aide Sociale à l’Enfance et de la Protection Judiciaire de la Jeunesse.
  • Priorité 2 : « Soyons plus vigilants » – Renforcer le repérage à tous les niveaux : formations pour une culture commune, améliorer le repérage et le signalement des mineur.es en situation de prostitution dans les établissements scolaires, les lieux de santé, les hôtels et plateformes d’hébergement locatif, dans la rue ; agir sur les réseaux sociaux avec notamment des maraudes numériques ; optimiser la prise en charge des fugues par les professionnel.les.
  • Priorité 3 : « Protégeons les victimes » – Accompagner les mineur.es en situation de prostitution : reconnaître aux mineur.es le statut de mineur.es en danger relevant de la protection de l’enfance (comme la loi l’impose déjà) ; créer un dispositif d’accompagnement et/ou d’hébergement dans chaque département pour protéger les mineur.es victimes ; garantir aux victimes un parcours de soins spécialisés dans le cadre d’un déploiement du réseau des Unités d’Accueil Pédiatriques – Enfance en danger (UAPED).
  • Priorité 4 : « Accélérons les procédures contre les auteurs », clients et proxénètes ; s’organiser pour répondre aux défis.

 

Les 14 M€ annoncés devraient faire l’objet d’appels à projets : l’Amicale du Nid attend que l’expertise des associations spécialisées dans la prévention et l’accompagnement des victimes, mineures comme majeures, soit reconnue à travers le renforcement de leurs moyens d’actions.

 

L’Amicale du Nid l’a rappelé à Adrien TAQUET lors de sa visite en Seine-Saint-Denis le 9 novembre dernier valorisant l’action de la mission mineur.es de notre association et sur France 2 ce matin.

 

Contacts :

  • Marie-Hélène FRANJOU, présidente :              06 83 24 94 75
  • Delphine JARRAUD, déléguée générale :          06 07 15 55 65