Le Covid tue – La précarité et la prostitution aussi

Parmi les personnes les plus impactées par la crise actuelle, il y a celles qui sont en situation d’isolement et d’insécurité économique, celles qui n’ont pas de domicile sûr ou qui vivent dans des refuges, celles qui subissaient déjà la violence masculine quand celle-ci s’intensifie aujourd’hui.

 

Les personnes concernées par la prostitution sont parmi les plus fragiles, les plus exposées, et, probablement parmi les plus à risque d’être contaminées par la pandémie au virus Covid 19.
En grande majorité étrangères, le plus souvent sous l’emprise d’un proxénète ou d’un réseau mafieux qui sont les vrais bénéficiaires des gains de la prostitution¹, leur grande précarité est encore aggravée par les mesures de confinement. Ayant peu de moyens habituellement, elles en ont encore moins aujourd’hui et sont de ce fait en plus grand risque de subir des violences.
De toutes parts.

 

Quand elles sont installées dans une chambre d’hôtel et qu’elles ne peuvent plus en payer le coût, elles risquent de se retrouver à la rue. Il s’agit le plus souvent de femmes et il n’est pas rare que des enfants soient à leurs côtés.

 

La dégradation des conditions de vie des personnes à la rue et pour certaines en situation irrégulière est massive : contrôles de circulation dans l’espace public, distributions alimentaires en nombre réduit malgré l’implication des associations, accès à l’hygiène compliqué (douche, produits d’hygiène, lavage du linge etc.), accès aux soins plus difficile.

 

Quant à celles qui ont pu trouver un hébergement et sont accompagnées par l’Amicale du Nid, le confinement et la solitude qui lui est liée sont particulièrement difficiles à supporter par des personnes ayant vécu toutes sortes de violences.

 

Madame la secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes a répondu à la lettre collective que nous lui avons adressée (voir ci-dessous) : dans celle-ci elle appelle les services préfectoraux à l’action.
Nous l’en remercions.
L’Amicale du Nid veillera à ce que toutes les mesures demandées soient effectivement mises en œuvre.

 

Depuis l’installation des mesures de confinement, les salarié.es de l’Amicale du Nid sont à leurs postes, avec la même détermination et le même souci de répondre au mieux aux difficultés rencontrées par notre public.

 

Certes il n’est plus possible « d’aller vers » les personnes prostituées dans la rue ou d’autres lieux en extérieur comme avant mais des bons alimentaires, des chèques services, des colis d’hygiène sont distribués dans le respect des gestes barrières et autant qu’il est possible, les liens sont maintenus par des appels téléphoniques réguliers auprès des personnes accompagnées, toutes les structures d’hébergement et de logement gérées par l’Amicale du Nid sont maintenues. Et si les activités d’accueil de jour ne peuvent être poursuivies, des rencontres sont possibles en cas de situation exceptionnelle.
La diffusion de toutes les informations utiles sur la pandémie et sur les gestes barrières pour s’en protéger est faite, le numéro téléphonique à contacter en cas d’apparition de symptômes est donné, les attestations de circulation sont distribuées…
Toute la vie professionnelle au sein des établissements de l’Amicale du Nid a dû être repensée et réorganisée pour faire face à l’urgence sanitaire impactant un public des plus fragiles et tous·tes les salarié·es restent très présent·es auprès des personnes accompagnées pour les soutenir dans cette période très particulière.
Chaque semaine, les responsables locaux des différents établissements se concertent en visioconférence avec la déléguée générale pour répondre au mieux à toutes les situations.
Il faut saluer le travail de ces professionnel·les car eux·elles aussi préservent des vies, jour après
jour malgré les difficultés rencontrées.

 

La prostitution n’est pas une profession et ne l’a jamais été. Elle n’est que violences, est contraire à la dignité humaine. Ses répercussions sur les personnes qui la vivent sont extrêmement graves, portant atteinte à leur santé physique, psychique et sexuelle. Pour seul exemple, leur espérance de vie est diminuée de plus de dix ans.
Des mesures drastiques sont prises pour maitriser la pandémie au Covid 19.
La prostitution est une autre pandémie dévastatrice et létale, dont la pratique ancienne s’enracine dans le rapport de domination des hommes sur les femmes. Moins visible, elle est pourtant là et poursuit ses violences de façon continue depuis des temps immémoriaux.

 

C’est pourquoi nous continuerons à réclamer l’application pleine et totale, sur l’ensemble du territoire français, de la loi du 13 avril 2016 « visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées ».

 

Ce temps de confinement est aussi celui du 4e anniversaire de la loi de 2016, et à cette occasion l’Amicale du Nid lance une campagne de prévention de la prostitution sur Instagram à destination des jeunes (à retrouver ici @je_ne_suis_pas_a_vendre).


¹ 85% des revenus des personnes prostituées étrangères revient aux proxénètes et réseaux de traite qui les exploitent – Ministère de l’Intérieur – L’argent de la criminalité en France – Évaluation de 7 marchés criminels