Recommandation générale du comité de suivi CEDEF-CEDAW : une victoire abolitionniste

Le comité de suivi CEDEF-CEDAW (Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes – ONU) a voté le 06 novembre dernier une nouvelle recommandation générale n° 38 (RG 38) concernant la traite. Dans celle-ci ont été reprises les observations faites sur le terrain qui positionnent la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle comme découlant de la prostitution et surtout d’un marché, résultat d’une demande et d’une exploitation par des trafiquants.

 

Cette recommandation 38 est aussi le résultat de la vigilance des associations féministes abolitionnistes nationales et internationales, dont l’Amicale du Nid.

 

A remarquer notamment :

  • Dès l’article 1 de la recommandation générale, « l’exploitation de la prostitution » est insérée et pas seulement le  « trafic ». Ces termes apparaissent ensuite régulièrement dans le texte.
  • La Convention de 1949 est bien intégrée dans la recommandation générale, rappelant le droit international.
  • La recommandation évoque bien la demande et sa pénalisation. Elle parle notamment de « demand for the exploitation of prostitution ».

 

Cette recommandation est une victoire permettant une avancée vers l’abolition de la prostitution.

 

En voici quelques extraits :

  • L’article 6 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (la Convention) énonce l’obligation légale des États parties de « prendre toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour supprimer toutes les formes de traite des femmes et d’exploitation de la prostitution des femmes« . Malgré la pléthore de cadres juridiques et politiques de lutte contre la traite des êtres humains aux niveaux national, régional et international, les femmes continuent de constituer la majorité des victimes de la traite détectées dans le monde et les auteurs de ces actes jouissent d’une impunité généralisée.
  • De l’avis du Comité, cette situation persiste en raison d’un manque d’appréciation des dimensions sexospécifiques de la traite en général et de la traite des femmes et des filles en particulier, qui sont exposées à différents types d’exploitation, y compris l’exploitation sexuelle. Une analyse sexospécifique de ce crime révèle que ses causes profondes résident dans la discrimination fondée sur le sexe, notamment l’incapacité de remédier aux structures économiques et patriarcales dominantes et l’impact négatif et différencié selon le sexe des régimes de travail, de migration et d’asile des États parties qui créent les situations de vulnérabilité conduisant à la traite des femmes et des filles.
  • L’article 6 de la Convention est basé sur l’article 8 de la Déclaration des Nations Unies sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes de 1967, qui stipule que « Toutes les mesures appropriées, y compris la législation, doivent être prises pour lutter contre toutes les formes de traite des femmes et d’exploitation de la prostitution des femmes ». Le droit international sur cette question a été codifié et développé par la Convention de 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation d’autrui. Cette base juridique exige que l’article 6 soit lu comme une disposition indivisible, qui lie la traite et l’exploitation sexuelle.
  • Les technologies numériques ont ouvert de nouvelles possibilités pour avoir un impact positif sur la société. Dans le même temps, elles posent de nouveaux défis en matière de sécurité, tant au niveau des individus qu’à celui des États. L’utilisation de devises électroniques offre des outils permettant de dissimuler des informations personnelles telles que l’identification des parties concernées et leur localisation, et permet d’effectuer des paiements anonymes sans révéler l’objet de la transaction. Tout cela facilite la tâche des personnes impliquées dans le trafic. Les canaux de demande par le biais des médias sociaux, du web noir et des plateformes de messagerie permettent d’accéder facilement aux victimes potentielles, ce qui accroît leur vulnérabilité.
  • L’utilisation de la technologie numérique pour le trafic pose des problèmes particuliers lors des pandémies mondiales. Dans le cadre de la COVID-19, les États parties sont confrontés à l’augmentation de la traite dans le cyberespace : un recrutement accru pour l’exploitation sexuelle en ligne, une demande accrue de matériel et de technologie pour les abus sexuels sur les enfants ont facilité la traite des enfants.

 

La recommandation complète peut être téléchargée ci-dessous :